Le matin était déjà fort avancé, le soleil s'élevait lentement dans les airs, reposant parmi un ciel bleu, clair et sans aucun nuage. Une belle journée de printemps : l'été arrivait et on le sentait avec cette température bien chaude. La pluie avait cessé le matin même, laissant sur les buissons qui l'entouraient, une fine rosée qui s'évaporait lentement. Or, l'orage allait revenir plus tard, de nombreux signes pouvaient le démontrer. L'air était lourd et le vent chaud transportait avec lui une grande humidité. Les petits oiseaux blancs volaient bas et la jeune fille était certaine que si une vache serait devant elle, l'animal de bétail serait couché, telle que décrivait la croyance populaire. Assise sur un banc de bois, la tête penchée vers l'arrière et pendue dans le vide, elle fixait l'azur de ses grands yeux dorés. Un fin sourire sur les lèvres, elle respirait profondément, reprenant son souffle. Sa poitrine se soulevait rapidement et son cœur battait dans ses tempes. Elle venait de courir pendant une bonne demi-heure, comme elle aimait tant le faire. Il faut dire que traverser Chocolate Town pour visiter Avenue of the roses permettait une longue promenade. Ce quartier n'était pas son voisin, mais la distance se faisait moins grande si on comparait avec Feathers Road. L'adolescente posa le goulot de sa bouteille d'eau sur ses lèvres, bascula vers l'arrière le contenant et laissa couler le liquide bien frais dans sa gorge. Un soupir de satisfaction, elle vida une petite partie du liquide sur son minois. Scarlett se redressa, passant sa main sur son visage, glissant ses doigts sur ses joues pour retirer l’excédent d'eau. Quelques mèches blondes se collaient contre ses traits, faisant tomber dans un rythme régulier des gouttelettes sur le bois acajou qui la soutenait.

La jeune enfant ferma les yeux, humant les diverses odeurs qui l'entouraient. Là, un soupçon de rose, ici l'odeur familière des tulipes. Ses sourcils se froncèrent, une moue de dégoût se traça à ses lèvres : il y avait également une odeur de lavande, horrible odeur que la blondinette avait difficulté à supporter. Cette fleur aux teintes qui dégradaient du lilas au violet avait toujours été la préférée de sa sœur adoptive aînée qui adorait se parfumer de façon exagérer avec ce nectar. Ainsi, au fil du temps, Scarlett considérait la jolie fleur comme un poison humain avec une senteur nauséabonde. Peut-être, un jour, réussira-t-elle à supporter cette odeur sans en avoir un haut de cœur.. La Goldson fit un mouvement gracieux dans l'air, chassant ces pensées de son esprit avant de prendre une nouvelle goulée d'air où se diffusait le parfum subtil du gazon fraîchement coupé. Sourire aux lèvres, la jeune fille ouvrit les yeux, fixant les merveilles qui l'entouraient avec délices. Ce jardin était l'un des plus beaux qu'elle avait vu. Il était même le plus beau, tout simplement. Il faut avouer que la jeune dame n'utilisait jamais le bon terme en parlant de ce lieu, car il s'agissait d'un parc, mais il y avait tant de verdures et une telles diversités de plantes qu'elle ne pouvait se séparer de ce mot. Décidément, l'Eden était emplis de surprises et d'odeurs qui plaisaient à la jeune Chocolate.

Étirant ses jambes devant elle, Scarlett laissa sa mâchoire s’étirée, laissant un bâillement déformé ses traits. Tel un chat, elle réveillait ses membres. Amenant ses bras devant elle, elle les tira d'une façon quasi-masochiste avant de redresser le dos, dans l'espoir d'activer ses omoplates et sa colonne avant de laisser sa main frotter son œil droit. La lycéenne se leva, tentant de se convaincre mentalement de retourner chez elle. Non, elle n'était pas lâche de retourner à pied vers sa demeure : elle aurait tout simplement utiliser sa plume si tel aurait été le cas. Il y avait deux raisons principales qui lui faisait perdre l'envie de partir. La première et la plus conséquente : le bordel qui régnait dans son petit appartement. Le courage de Blondine était détruit à chaque fois qu'elle pénétrait dans ses pièces et il ne semblait pas prêt d'arriver. La seconde et non la moindre : la beauté des lieux. Elle n'avait point envie de quitter une ville aussi belle et aux odeurs ravissantes. Après tout, si elle aurait dû choisir un autre quartier, Avenue of the roses aurait été son second choix sans hésitation. Surtout à cause de son centre commercial qui, contrairement à celui de Chocolate Town, était en grande partie consacrée uniquement à la mode. C'est dans Pétales & Épines qu'elle dépensait la majorité de ses salaires, sans aucun regret pour les achats. D'ailleurs, elle abordait fièrement l'un de ses derniers sur son corps en ce moment même. C'était une tenue très simple, mais utile et appréciée. Une banale camisole blanche avec des bretelles plutôt large – environ deux doigts – en dentelle qui s'attachaient dans son cou, pour former une belle boucle. La dentelle étant longue, elle frisait dans le dos de Scarlett qui était laissé nue jusqu'au centre de ce dernier. Accompagnant son haut, elle portait un short en coton de style sport d'un gris clair avec une large bande jaune pour serrer au niveau de son bassin. La camisole étant plutôt courte et le bas étant à taille base, on pouvait apercevoir sans problème sa peau blanche au niveau de ses hanches, laissant visible son tatouage dans le bas du dos.

Mais, outre pour une envie folle de magasinage, pourquoi l'adolescente pouvait rester dans le quartier qui n'était pas le sien? Surtout que, selon les rumeurs, les Springs Roses n'appréciaient pas les Summer Chocolates. Scarlett ignorait totalement pour quelles raisons, mais elle se répondait mentalement par un simple haussement d'épaules. Les gens qui circulaient devant elle ne la pointait pas du regard comme si elle était le démon et ne la fixait pas comme une simple étrangère; ils passaient simplement devant elle, sans lui demander de déguerpir. Il faut dire que la majorité circulait d'un pas rapide, la tête haute comme s'il devait aller dans un lieu où des gens plus importants que les autres l'y attendaient. Phantom reprit une gorgée d'eau et referma sa bouteille qu'elle glissa dans son sac. Ce petit accessoire faisait parti de ses chouchous. Un sac à main en bandoulière d'un blanc légèrement sale et vieux avec des motifs de fleurs tribales en noir délavé sur sa totalité. Même s'il commençait à être user, le sac à la forme lâche était son trésor le plus chère lorsqu'elle allait courir. Il était assez serré pour ne pas traîner et la gêner dans son jogging et lui permettait de transporter de nombreuses choses, sans être trop gros. D'ailleurs, il contenait en ce moment son agenda,son horaire de travail, un cahier à dessin, un appareil photo, des crayons de toutes sortes et même quelques petites bombes en aérosol dans des couleurs de base qu'elle avait su trouver chez un bon marchand. Ces petites choses pouvaient lui permettre de faire un tatouage temporaire à ceux qui le voulait bien. D'ailleurs, c'était la manière de travail de Scarlett : d'abord, elle faisait le tatouage de façon temporaire à une personne, avec un spray aérosol. Si cette dernière aimait, il lui suffisait de rappeler afin d'avoir rendez-vous pour se faire tatouer un permanent avec l'ami de tous, l'aiguille.

Donc, la jeune fille replaça ses couettes blondes en ajustant l'élastique où y était relié une breloque de cuivre en forme de fleur. Elle fit également un échange entre sa bouteille d'eau et son carnet de dessin. L'épais livre était relié par des anneaux en métal sur les côtés et possédait une simple couverture noire où, au centre, un collant blanc avait été appliqué avec minutie. En cursive, la jeune fille avait inscrit son nom et son adresse. Lentement, elle l'ouvrit, comme si un trésor y était renfermé. Elle traversa le premier onglet, les croquis de tatouages de certains clients, et s'arrêta au second onglet où ses plus récents dessins étaient dessinés au plomb. D'abord, un adolescent plus âgée qu'elle qui s'occupait de tondre le gazon, ensuite des dessins des fleurs qui recouvraient le parc et de ses paysages féeriques. Il y avait quelques portraits, mais très peu.. Arrachant une page, la jeune fille écrit en capitale avec un feutre noir un mot. Se levant, elle attrapa une agraffeuse dans son sac et s'approcha d'un panneau utilisé pour des annonces, elle y brocha son mot avant de retourner à sa place. Il lui suffisait d'attendre..