Minuit sonne. Clap. Clap. Clap. Une bille roule au sol, propulsé de manière mystérieuse. Ainsi va le jeu du chat et de la souris, mais faut-il encore être sûr que la souris survive aux coups fourbes d’un chat. Une deuxième bille, puis une troisième. Et des dizaines suivent encore, la nuit est sombre mais la lumière de la lune se réfléchit sur les lisses sphères métalliques. Un garçon inconnu hurle enfin. Il tombe. Il rampe. Il meurt. On n’entendra plus jamais parler de lui. Qui était-il au juste ?



-Quelques jours auparavant. –


Quelle jolie journée tout de même. Oui, un soleil brillant et une humeur euphorique aurait pu être les bienvenus dans le parc. Joyeux et heureux d’apparence seulement, Vassily ne se faisait pas attendre. Déjà en retard, il court dans tout les sens, depuis quelques jours des évènements étranges se passent dans le parc. Un mouton est retrouvé dans la grande roue. Le jour suivant, le train fantôme est repeint en rose, une peinture fraîche mais très bien faite. Et le jour d’après encore, un projecteur allumé venu de nulle part apparait dans les attractions qui se font dans le noir, révélant ainsi un peu de mystère, la machinerie est dévoilé, rompant ainsi le charme d’une attraction. Mais bon sang, qui ? Qui joue avec ses nerfs ? Il n’en peut plus, il n’en veut plus. Un lutin s’amuserait donc à provoquer Vassily ? Sous la pluie, aujourd’hui, Vassily a lui-même retrouvé un employé ligoté au mat de l’Aquatrus, le bateau mécanique alors que celui-ci était en marche. L’employé ne se souvient de rien, étrange donc. Une importante réunion du personnelle. Courant dans tout les sens, il devait faire bonne figure, il n’avait pas le choix mais son cœur lui disait de crier, de frapper et de détruire chaque chose qu’il verrait. Il s’arrêta enfin. Debout.

« Calme-toi Vass’ sinon, on va avoir un problème supplémentaire sur les bras. » se dit-il à lui-même.


Il donna un coup rapide et sec dans le vent, puis un autre et un suivant encore pour se défouler. Apaisé et rapidement épuisé, il prit enfin la direction de son bureau. Décidé à capturer l’homme qui torturé ses journées et qui empêché ses nuits.



-Quinze heures auparavant. –

Aujourd’hui. Jour nouveau, on a retrouvé la première véritable attaque personnelle. Vassily s’est réveillé les yeux rouges, littéralement. Horrifié, il avait compris le tour, ce devait être une plume d’écriture, ce qui est écrit devient réalité. De plus, trois petites griffures bien rouge aux côtés de chacun de ses yeux ; Ces dernières décrivent la forme que font les rides qui apparaissent lorsque l’on sourit. Furieux, il était véritablement furieux. Une colère noire et quelqu’un qui rirait bientôt jaune. Après s’être observé un bon moment le visage et le reste du corps, jamais ne sait-on ce qu’il aurait pu faire d’autre, il parti se laver. Prendre une douche quotidiennement permet une bonne hygiène après tout. D’ailleurs, durant ce laps de temps, il se rendit compte que ces marques de griffes étaient profondément incrustées comme présente depuis toujours et qu’elles n’avaient jamais cicatrisées.

Une fois sorti, il partit prendre son petit déjeuner, des pains au chocolat, du lait et du jus de fruit, rien d’extraordinaire. Il se mit enfin en route. Direction, le boulot, sa vie, son parc.

Il en profita pour faire par la même occasion son jogging quotidien. Une vingtaines de minutes plus tard, il arrivait au parc. Il était déjà ouvert, en fait, il me semble ne jamais avoir été fermé sauf les Week-end et certains jours de rénovation. Cette nuit, il devait être fermé, une attraction en panne avait besoin d’espace pour être réparé librement. Un pas, un second puis un troisième, pour chaque pas fait, une personne le dévisageait, plutôt désagréable. Il n’avait donc jamais vu quelqu’un avec les yeux rouges et des griffures sur le visage. Quelle bande de pénibles ! Et voilà, que même les employés l’interrogeaient, ils allaient donc tous s’y mettre. Il expliqua brièvement la situation à chacun, comme ça, ce fut fait. Évidemment, impossible d’éviter ceux qui viennent s’attrister pour vous, ou encore ceux qui viennent se moquer mais essaient de rester gentil en votre présence, toujours brosser le patron dans le sens du poil …

La haine viscérale qu’il portait à l’individu ferait qu’il le reconnaitrait entre mille quand il le verrait. Ce fumier, cette ordure, ce déchet se croyait mieux que lui, que son parc. Il se trompait. Il souffrirait pour cet affront. Il devait être dans le parc, c’était obligé, un maniaque et psychopathe de ce genre devait vouloir admirer son travail. Il cherchait, cherchait et cherchait encore. Un homme ou une femme ? Grand ou petit ? Gros ou maigre ? Il ne savait pas sur quelle type de personne se focaliser. Et puis bientôt, il le vit là, devant lui. Il ne se cachait même pas.

~ Démon ! Face à Vassily, on regrette toujours de telles actions … ~


Le point serré, il dut se retenir de ne pas faire de vague. Pourquoi ? Comment ? Qu’est-ce qu’il prouvait que c’était lui ? Simplement, le sourire narquois. Vêtu d’un gilet sans manche, d’un tee-shirt blanc et d’un pantalon en tissu de couleur vagabonde, entre beige et blanc-cassé, indescriptible. Il s’appuyait sur une poubelle. Dans sa main gauche, un petit carnet et un stylo, ce qui confirmé ses idées ; Une main gauche vide. Il porta bientôt cette même main auprès de son visage et tapota sur sa tempe. Il voulait jouer au malin. Quand on est une souris, on ne joue pas avec un chat. Il s’approcha doucement de lui et glissa discrètement :

« Reviens à minuit. Attends-moi près de la grande roue. Nous devons discutez de tes agissements. »


Un sourire sur le visage, un sourire faux mais si bien fait, que l’on n’aurait pas cru à sa malveillance. Qu'est-ce qui le pousserait à suivre son conseil ? Probablement qu'il se croirait invicible, mais en homme, il était loin de l'être ...



-Maintenant. Quelques secondes avant l’acte fatidique. –

Minuit sonne. Clap. Clap. Clap. Une bille roule au sol, propulsé de manière mystérieuse. Ainsi va le jeu du chat et de la souris, mais faut-il encore être sûr que la souris survive aux coups fourbes d’un chat. Une deuxième bille, puis une troisième. Et des dizaines suivent encore, la nuit est sombre mais la lumière de la lune se réfléchit sur les lisses sphères métalliques. Vassily, coupable du péché de colère, expédie une bille sur le rongeur qui s’écroule rapidement dans un cri rapidement étouffé. Transpercé au niveau des poumons, il respire difficilement. Au sol, il essaie de ramper. Il s’approche de Vassily, lève la main pour demander la pitié. Vassily recule. Puis, donne un coup dans le crâne. Il ne bouge plus décrochant un sourire ainsi au bourreau. Il n’est pas un meurtrier en puissance, mais seulement un criminel occasionnel. Il le sait, s’il n’avait rien fait, l’autre aurait fait courir des risques de plus en plus grave à lui, ses employés, mais surtout, à son parc.

Bientôt, on entendit creuser et un corps tomber. Un carnet brûle sur la sépulture. Les charmes seront ainsi brisés mais il faudra du temps pour que leurs effets se dissipent, il aura vraiment agacé Vassily jusqu’à ce que mort s’ensuive. Fatigué de la nuit, il abandonné l’arme ainsi que l’outil dans les bois pour partir dormir. Il eut un sommeil paisible, lourd et reposant.

Le lendemain la journée fut belle, une fine brume le matin. Les yeux et les griffures toujours présentes, mais peu importé. Le soleil arriva ensuite. Une fois au parc, il put profiter pleinement de sa journée. Si bien, qu’il décida de se prendre une barba à papa avant d’aller à son bureau. Un repos bien vite perturbé. Un petit moment après, il était au sol, renversé. Ses yeux rouges et les marques lui donnaient un air satanique, un démon, un ange déchu même ? Il se releva, mais n’était pas vexé. Il sourit finalement, un accident qui lui, était banal. Son sourire était terrifiant, encore une fois à cause de l’Autre. D’ailleurs, il pensait, il n’avait jamais su son nom, peut-être était-ce mieux ainsi ?

« Oups, désolé. Je suis tombé sous vous ! Je m'en excuse»


Il rit enfin. Un rire vrai, soulagé. Et étrangement, sa phrase, il l’a pensé ; Ce n’était pas de l’humour … Niais, combattif et protecteur. Un personnage aux multiples facettes qu’était le jeune Vassily. Mais l’autre qui était-il ? Lui ne perturbé pas, ou au minimum.

« Je me présente tout de même. Je suis le gérant de ce parc. Vassily Ivanov. Pour vous servir. »


Évidemment, il avait reconnu ses traits typiquement anglais, et en bon gérant de parc, il avait appris quelques langues dont l’anglais, le français, le japonais et l’arabe sans oublier sa langue maternelle le russe.

« Mon parc vous plait au moins ? »


Oui, il ne voulait pas laisser de vide dans une conversation. Il enchaîna donc avec une première question, l’esprit tranquille.

Alexis légèrement embarrassé, s'écarta rapidement de la personne qu'il venait tout juste de percuter par accident en affichant un mine sincèrement désolée. Un frisson étrange le parcourut lorsque ses yeux se posèrent sur « la victime » de sa maladresse. Yeux rouges, marques étranges et plus encore un sourire effrayant dans le style clownquvienttefoutrelafrousse, le firent déglutir péniblement. Aussi, il ne pouvait s'empêcher de le dévisager. C'était malpoli il le savait, mais Alexis ne pouvait arracher ses yeux de cet étrange individu dont les lèvres étaient toujours tirées en un sourire effrayant. Un instant plus tard, et les lèvres se mirent à remuer. Il parlait. Mais trop absorbé dans sa contemplation, les mots ne firent qu'effleurer brièvement Alexis, sans qu'il n'en capte le sens.
Ce fut la douleur aiguë, ressentie au niveau du bras qui le ramena brusquement à la réalité. Vraisemblablement, Alexis était mal tombé.
Il constata encore une fois, que son interlocuteur lui foutait la frousse, avant de se gratouiller le sommet du crâne, gêné. Et tant il l'était, il ne savait que dire et Il se dandina un instant sur ses pieds en laissant planer un silence désagréable.
Puis finalement, le fait tout bête de devoir s'excuser devint évident et il se confondit en un flot de pardon embarrassé. Il fit fuser les « sorry » « excuse me » « my bad » « please forgive me » et pensa un moment à s'incliner avant de se raviser. D'ailleurs, il se rendit compte, qu'il ne savait même pas si l'autre parlait anglais. Mais espérons toujours.
Alexis se rappela soudainement de la grosse brute qui le poursuivait et se retourna l'air inquiet. Le gros balourd n'avait pas chaumé et avait mis le temps laissé à profit. Il devait se trouver à à peine un vingtaine de mètres et fonçait vers l'Américain tel un tgv sur sa lancée. Sans prendre le temps de s'attarder plus longtemps, Alexis se remit à courir tout droit et dépassa l'homme qu'il avait renversé un instant plus tôt, le plantant sur place. Il s'était excusé, il pouvait donc repartir tranquillement non ? Enfin 'tranquillement'.
Une nouvelle fois, Alexis se retrouva à courir à travers les allées du parcs, sautant par dessus flaques et petits obstacles et esquivant les personnes obstruant le chemin avec grande agilité. Sauf que cette fois, Alexis n'était guère insouciant. En effet, le fait d'être rentré en plein dans quelqu'un l'avait légèrement refroidi. Car si on omettait le fait que ce n'était pas la première fois qu'il le faisait, il savait que sur ce genre de collisions on pouvait blesser sérieusement. Et en plus, il était parti de manière plutôt cavalière, et Alexis renverrait sans doute par la même occasion une mauvaise impression. Ce qu'il n'aimait pas, mais passons.
Fatigué de jouer au petit lapin, il jeta un énième regard derrière lui et constata avec soulagement qu'il avait enfin largué le gros tas. Il s'arrêta de courir et se mit à marcher, nonchalant. Il déambula encore un moment avant que la culpabilité qu'il ressentait pour l'homme sans aucun nom qu'il avait renversé ne vienne le submerger. Au risque de retomber nez à nez avec la grosse brute il rebroussa le chemin et s'engagea sur le retour de l'aller.